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L’autrice et animatrice québécoise Geneviève Pettersen
Photo : Krystel V. Morin
Radio-CanadaPublié à 20 h 07
Après avoir vendu 43 000 exemplaires de La déesse des mouches à feu, l’autrice Geneviève Pettersen fait revenir son personnage de Catherine dans son nouveau roman, La reine de rien. L’adolescente rebelle est devenue une trentenaire, mère de deux enfants et mariée, mais dont le couple explose. Avec cette femme qui a « l’air pas fine, mais qui est profondément humaine », Geneviève Pettersen veut « libérer la pensée des madames ».
Après avoir marqué les esprits dans sa version en livre, La déesse des mouches à feu a été adapté en film en 2020 par Anaïs Barbeau–Lavalette. Beaucoup de gens me demandaient : “Qu’est-ce qu’est devenue Catherine?”
, raconte Geneviève Pettersen, qui assure que l’on peut apprécier son deuxième et plus récent roman sans avoir lu le premier.
L’ancienne ado s’est glissée naturellement sous la plume de l’autrice. Cette dernière venait de reprendre l’écriture d’un livre sur la fin d’un couple, un ouvrage qu’elle avait mis de côté pendant deux ans pour prendre un peu de recul par rapport à sa propre rupture avec le père de ses enfants, l’écrivain Samuel Archibald. Au bout de trois pages, [Catherine] est revenue.
Infidélité et rupture
Consommatrice de drogue dans La déesse des mouches à feu, Catherine allait-elle mal finir? Non, a décidé l’autrice. Mais elle n’est pas une adulte si normale que ça. C’est ce que je voulais écrire.
Devenue journaliste, Catherine s’ennuie dans sa vie amoureuse et jette son dévolu sur un père de famille, en couple, croisé au cours de natation de sa fille, un homme qu’elle veut pour elle toute seule. L’héroïne est également confrontée à l’éclatement de son couple.
Malgré des ressemblances avec sa vie, Geneviève Pettersen assure que la Catherine de La reine de rien est un personnage beaucoup plus éloigné d’elle que celle de La déesse des mouches à feu.
Que tu écrives de la science-fiction ou un roman sur un couple qui se sépare, cela passe par un canal qui est toi, explique-t-elle. Après, c’est tellement remis sur le métier à tisser, tu passes des jours sur la page à retravailler les mots, les phrases, le rythme… qu’à la fin, ça n’appartient plus à personne, [à part] aux personnages.
« La reine de rien », de Geneviève Pettersen, est publié aux éditions Stanké.
Photo : Stanké
Une Catherine en colère
La romancière dédie son nouveau livre aux petites crisses qui sont devenues des madames
. Elle décrit sa Catherine actuelle comme une femme animée par une violence. Elle fait des choses absolument inacceptables […] et s’autorise à dire des choses épouvantables [comme le fait de préférer un de ses enfants par rapport à l’autre].
« On a beaucoup parlé de la libération de la parole des femmes, mais pas beaucoup de la libération de la pensée, de ce qu’on s’autorise à penser. »
Toutefois, si Catherine a l’air pas fine
, elle est profondément humaine
, en colère et très souffrante
, selon Geneviève Pettersen. Si je pouvais lire dans les pensées [des gens], je ne suis pas sûre que ce serait toujours beau. Ce que je voulais faire, c’était de libérer la pensée des madames.
La reine de rien est centré sur la tempête que constitue la séparation d’un couple, une période mouvementée où les gens ne montrent pas toujours le meilleur d’eux-mêmes.
C’est un moment pas glorieux, où l’on fait tous des affaires un peu bizarres, comme envoyer des textos méchants à notre ex, car on est fâchés
, dit Geneviève Pettersen.
On parle de l’avant [-rupture], de l’après, mais le moment où tout le monde veut s’arracher la tête, c’est tabou.
Pour un droit à l’erreur
En offrant une incursion sans censure dans la tête de Catherine, Geneviève Pettersen a souhaité parler d’humanité. C’est un livre qui est contre les absolus. Je trouve qu’en ce moment, on est beaucoup dans les absolus, comme si ce n’était pas possible de mal agir ou de dire quelque chose d’épouvantable.
Parce qu’on est tous le produit d’une éducation. On est dans un virage social qui est fondamental et important, il faut se laisser une petite chance de s’adapter
, ajoute-t-elle.
En 2020, Geneviève Pettersen a été vivement critiquée après avoir dénoncé, lors de l’émission qu’elle animait alors sur QUB Radio, la manière dont l’influenceuse Elisabeth Rioux avait utilisé les réseaux sociaux pour formuler des allégations de violence conjugale à l’encontre de son ex-conjoint.
Accusée de stigmatiser l’apparence physique d’Elisabeth Rioux plutôt que de porter attention à la violence conjugale dont elle racontait être victime, Geneviève Pettersen s’était ensuite excusée pour ses propos.
Quand on fait une gaffe comme celle que j’ai faite dans la vie, tout le monde dit : “Il faut que tu apprennes de ça”, indique-t-elle. J’ai voulu apprendre de ça et fouiller ce sujet-là.
Je ne regrette pas que cela me soit arrivé, car ça m’a permis de réaliser qui je voulais être dans l’espace public et qui je ne voulais pas être.
Publié aux éditions Stanké, La reine de rien arrivera jeudi dans les librairies.
Ce texte a été écrit à partir de l’entrevue réalisée par Guy A. Lepage à l’émission Tout le monde en parle et celle réalisée par Émilie Perreault à l’émission Il restera toujours la culture. Les propos ont pu être édités à des fins de clarté et de concision.