« Mon père mort me montre deux brins de muguet rouge. » Ainsi débute ce recueil posthume d’un grand poète de l’intime, celui d’une parole calme qui rejoint l’essentielle confidence des peines et des joies, les unes aux autres mêlées. Christian Bobin est mort en novembre dernier, nous laissant une oeuvre majeure, mais surtout cette fleur rouge comme un don, comme si nous le connaissions : « Un ami, c’est quelqu’un à qui on fait le cadeau de l’étonner. » Et c’est bien ce qui se produit au fil de la lecture de ces poèmes en prose, sorte de journal déplié au fil du souffle poétique.
« Aller d’une présence subtile à une autre présence subtile pour en extraire une nourriture solaire est un travail d’abeille et de poète. Ce monde détruit les deux. » Alors, il faut veiller, trouver du temps pour rejoindre ceux et celles qui perçoivent L’en dessous l’admirable, comme le disait Jacques Brault. Écrire, pour cela. Donner à voir le geste de la main traduisant ce qui du dedans vers le dehors s’anime.
Ainsi Bobin décrit-il cet acte précieux du geste : « La calligraphie fut inventée au Japon au quatrième siècle d’après les empreintes de pattes d’oiseaux sur le sable d’une plage. Au vingt et unième siècle, le monde travaille à effacer les oiseaux et l’écriture manuscrite — mais partout et toujours sur Terre des petites mains ailées de deux, trois, quatre ans, barbouillent du papier, cassent des craies, peignent sur les murs et les vêtements, “en mettent partout”, écrivent. »
Ainsi, le poète
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