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À quelques mois de son 100e anniversaire, Janette Bertrand a lancé mardi un nouveau livre, Cent ans d’amour, qui rassemble ses réflexions sur la vieillesse. Au fil d’une célébration du grand âge, elle aborde aussi ses inconvénients, comme la maladie, la perte d’autonomie, l’incontinence et la remise en question des standards de sexualité.
La femme de lettres, qui aura 100 ans le 25 mars prochain, estime qu’elle a eu amplement le temps de trouver la formule du bonheur. Il est dans le présent, il est là si on sait le voir
, explique-t-elle.
Il y en a qui ne sont pas capables de le saisir. Ils ne voient que les choses qui vont mal dans la vie, mais ils ont perdu de vue les petits bonheurs. Et c’est un peu ça que je veux redonner dans le livre avant mon grand départ.
Avec son nouvel essai biographique, Janette Bertrand souhaite briser les tabous entourant le fait de vieillir et convaincre les gens que le grand âge vaut la peine d’être vécu, qu’il y a moyen de vieillir en ayant du fun
.
Un marathonien, on l’applaudit. Je suis rendue là, j’ai 100 ans. C’est une fierté pour moi, ça fait 100 ans que j’existe. J’ai trois enfants, huit petits-enfants, sept arrière-petits-enfants, j’ai une famille tissée serré, une belle carrière, je suis contente.
Culottes d’incontinence et sexualité
Cent ans d’amour ne se contente pas d’une vision jovialiste de la vieillesse. Janette Bertrand ne lève pas les yeux sur les tabous qui entourent le sujet, à commencer par l’un de ses plus grands secrets de Polichinelle : l’incontinence.
Je suis la première à en parler. Je trouve ça épouvantable qu’on ait honte de ça, ça n’a pas de sens. Environ 90 % des personnes âgées de 80 ans et plus ont de l’incontinence, et personne n’en parle
, s’indigne-t-elle.
Par chance, on a des moyens maintenant, qui s’appellent les culottes. Moi, je ne voulais pas en entendre parler, j’aimais mieux faire pipi à terre, mais un jour une amie m’a dit : veux-tu que je te montre ma culotte? Il faut enlever ce tabou-là, tout le monde le vit, il faut dédramatiser.
La même franchise imprègne les propos de l’autrice sur la maladie, elle qui a survécu à un cancer du sein avant de frôler la mort en 2018, à la suite d’une septicémie. C’est la perte de contrôle, la perte d’autonomie qui fait souffrir, bien plus que la maladie
, explique-t-elle.
Janette Bertrand n’a pas non plus peur de parler de sexualité chez les personnes âgées qui, selon elle, ne peut exister que dans une réévaluation des attentes.
Faire l’amour à un certain âge, c’est comme une course dont l’arrivée ne compte pas. On le fait pour le trajet. Pour les lecteurs qui ne comprendraient pas l’allusion : ne visez pas la pénétration à tout prix.
Vieillir en ayant du fun
Janette Bertrand espère que son nouveau livre saura inspirer, ou à tout le moins rassurer, les personnes qui sont en perte de repères par rapport à l’inévitable passage du temps. Et surtout les rassurer sur le fait que la vieillesse n’est pas glauque. Elle espère aussi contrecarrer l’âgisme qui se profile de plus en plus dans la société québécoise.
On ne sert plus à rien. Il n’y a personne qui discute avec nous, on ne nous demande pas de conseils. Mais chaque personne âgée mérite qu’un jeune s’assoie avec elle et lui demande “qu’est-ce que tu penses de ça, pépère?”
illustre-t-elle.
J’aimerais ça que ce livre-là soit lu à partir de 50 ans. Il y a des personnes qui l’ont lu et qui m’ont dit : “Ça a complètement changé ma vision de la vieillesse. J’avais peur de vieillir, mais là, je pense qu’il y a moyen de vieillir en ayant du fun.”
Avec les informations d’Émilie Perreault