Paru en premier sur (source): journal La Presse
Dans La pire affaire, Caroline Louisseize nous plonge dans une banlieue où une enfant hypersensible, cible du rejet et de l’intimidation, apprend à survivre en érigeant l’excellence scolaire en rempart.
Publié à 12 h 00
Arrivée à l’université, la narratrice vacille. Le monde des idées la déroute. Elle ne sait plus comment exceller en tout, comment répondre à cette promesse d’irréprochabilité qui lui a servi d’armure. Ce désarroi, Louisseize le dessine magnifiquement tout au long de cet unique recueil coming of age en cinq parties qui ne finit jamais tout à fait, où l’émancipation n’est ni linéaire ni triomphante.
Louisseize scrute les mécanismes de défense de son personnage, dévoilant les failles d’une identité construite sur l’approbation extérieure, le miroir déformant d’une vulnérabilité toujours plus profonde. « Ma main fait fi des pupitres chahutés en chœur, je reste prête. Le mécanisme de lever la main est prompt, il reconnaît les points d’interrogation dans la voix. L’institutrice monte le ton d’un degré ; c’est un vrai ressort, je fonce. »
La langue est directe, sans fioritures, une poésie brutale qui prend aux tripes. Dans ses épigraphes, la poétesse convoque Ovide, Camille Readman Prud’homme ou Georges Brassens. Ses phrases, percutantes, s’enfoncent comme des éclats de verre dans la conscience du lecteur, qu’elles se lient en vers ou en prose.
La pire affaire est l’exploration minutieuse d’une stratégie de survie. Un livre remarquable qui frappe par sa maturité stylistique et sa finesse psychologique.
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La pire affaire
Le Noroît
104 pages