Woke, raciste, doux rêveur ou « privilégié ». Depuis quelques années, les noms d’oiseaux pleuvent dans le débat public. Les positions se braquent, et les mots sont dépossédés de leur sens.
« Lorsque nos débats deviennent des combats, ils versent dans le moralisme, l’agitation et l’intoxication », écrit le philosophe et essayiste Alain Deneault dans un nouvel essai intitulé Mœurs. De la gauche cannibale à la droite vandale. Un livre riche, à la fois posé et combatif.
L’espace du doute et de la nuance lui semble rétrécir. Un espace pourtant nécessaire à toute pensée complexe. Un lieu où chacun ne serait pas sommé de choisir son camp entre deux extrêmes, alors que plane l’urgence d’agir vraiment face à des enjeux autrement plus cruciaux pour la planète et pour l’humanité.
Contre les généralisations à l’emporte-pièce et le dialogue de sourds, l’essayiste tente de faire tomber les masques qui sont portés autant à droite qu’à gauche, et de redonner aux mots leur sens et leur pouvoir. Un acte courageux, tant la parole sur ces questions semble être devenue difficile à prendre.
« Un livre part très souvent part d’un malaise », explique Alain Deneault, joint à son bureau du campus de Shippagan de l’Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick, où il est professeur de philosophie et de sociologie. « Un malaise quant à des pratiques, poursuit-il, des discours, des méthodes, des attitudes qui étaient celles de gens appartenant à ma classe sociale. Et j’ai tenté de rendre justice à la complexité de certains problèmes qu’on avait tendance à beaucoup simplifier dans
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