« Alice, Aliki, Kiki. Reine de Montparnasse. Modèle prisé par les artistes de l’École de Paris. La muse. L’égérie. La gouailleuse. La chanteuse grivoise. La danseuse de cancan. Le boute-en-train. Voilà pour l’essentiel ce qu’on en dit. Elle a aussi été peintre — ça, l’histoire le dit moins — et elle a écrit. Ses Souvenirs paraissent en 1929, d’abord en français, puis en anglais (Kiki’s Memoirs), précédés d’une préface enthousiaste d’Ernest Hemingway. » Voilà comment Denise Brassard résume Alice Ernestine Prin, protagoniste de son récit, présentée avec enthousiasme, empathie, sinon amour.
On sent à chaque page l’attachement qui transpire de ce récit, ou plutôt ce roman, parfois aussi biographie, mais également essai. Cette confusion des genres est strictement volontaire et fonctionne parfaitement, avec une maîtrise telle que le passage d’un style à l’autre y est fluide et sans heurts.
Encore faut-il souligner que ce travail de style précis est nécessaire vu l’approche, car Brassard ne se contente pas de confondre les genres, mais elle intercale habilement l’histoire de l’héroïne et celle de la narratrice, quadra qui séjourne à Paris pour écrire justement à propos de Kiki. Cette double proposition contamine les deux figures, au point où la narratrice se découvre des parentés intrinsèques avec cette autre qui l’habite.
Montparnasse de légende
Se met en place un jeu fascinant alors que les diverses Kiki passent d’un amant à un autre, d’un peintre à l’autre, multipliant ainsi les occasions pour la narratrice de parfois faire de même, mais surtout de tracer des portraits,
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