Paru en premier sur (source): journal La Presse
Les traductrices de ce roman racontent en fin d’ouvrage qu’au moment où le livre commençait à prendre forme en français, la version originale embrasait le Brésil, retirée de bibliothèques municipales et scolaires de plusieurs États du pays.
Publié à 8 h 00
Le bolsonarisme avait beau avoir été défait aux urnes, des voix cherchaient encore à taire les questions « fâcheuses » que l’auteur aborde dans le roman. Violences structurelles, profilage racial, bavures policières, discrimination à l’embauche… C’est à son père, tombé sous les balles d’un policier, que le narrateur s’adresse et entreprend de raconter sa propre vie comme s’il en avait été témoin.
Depuis son enfance dans la pauvreté à sa carrière de professeur de littérature, dans un quartier défavorisé en banlieue de Porto Alegre.
Avec l’impression de pénétrer dans son intimité profonde, de s’immiscer dans ses rêves déçus et ses espoirs broyés, on découvre ces moments où il s’est aperçu qu’il attirait les regards dans certains quartiers de sa ville, au bras de sa copine blanche ; où il a compris pourquoi la police l’abordait aussi souvent dans la rue ; où un professeur lui a ouvert les yeux sur le « mensonge » de la race. On comprend aussi pourquoi, à l’aube de la cinquantaine, son père portait en permanence un sentiment de défaite sur ses épaules.
C’est une lecture troublante et hypnotisante, qui se dévore d’abord en raison du propos, mais qui captive également par sa forme – ce tutoiement qu’utilise le narrateur et qui vient nous chercher directement dans les tripes.
