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Craig Pike, le fondateur de la chaîne de biscuits à succès Craig’s Cookies, se définit avant tout comme un homme de théâtre. Il a accroché son tablier pour mettre en scène la pièce Angels in America de Tony Kushner au théâtre Buddies in Bad Times de Toronto, jusqu’au 17 décembre.
Dans la vie, il est fréquent que la réalité dépasse la fiction.
En 2013, Craig Pike, alors jeune comédien, se demande comment il va bien pouvoir payer son loyer et ses factures : semaines de travail par an “,”text”:”Dans les arts au Canada, c’est très difficile d’avoir 52semaines de travail par an “}}”>Dans les arts au Canada, c’est très difficile d’avoir 52 semaines de travail par an
. Il décide alors d’ouvrir son premier magasin dans le quartier Parkdale, il se lève tôt chaque matin pour préparer sa spécialité : des biscuits garnis d’autres friandises.
En 2015, cela fait deux ans que son premier magasin a ouvert. Il est quatre heures du matin et Craig Pike est dans son arrière-boutique en train de cuisiner des biscuits. Dans un murmure, il s’interroge : Mais pourquoi est-ce que je fais tout ça ?
Selon lui, c’est à cet instant qu’il a eu une révélation : il va faire marcher son entreprise et, grâce aux bénéfices, il va financer les arts.
Quelques années plus tard, la pandémie frappe. Les théâtres sont fermés et, dans un premier temps, il n’est plus question de rassembler un public dans une salle. Craig Pike y voit l’opportunité de développer au maximum son affaire florissante pour être prêt quand les rideaux pourront se lever à nouveau.
À chaque cookie sorti du four, l’artiste imagine quelle histoire [il] pourra amener sur scène, comment faire du théâtre un reflet de la vie des Torontois
.
Après avoir ouvert cinq succursales de Craig’s Cookies, Craig Pike est de retour sur les plateaux. Il a choisi de créer une compagnie et une chorale (That Theatre et That Choir) et avec la première, il présente Angels in America au théâtre Buddies in Bad Times.

Brenda Bazinet pendant les répétitions d’ « Angels in America »
Photo : Ben Sanders
Une grande fresque dans le New York des années 1980
Angels in America est un classique du théâtre américain de la fin du 20e siècle, qui a aussi été adapté à l’écran par la chaîne HBO en 2003.
À la manière d’une grande fresque, on voit évoluer différentes personnalités confrontées à la crise épidémique du sida dans le New York des années 1980.
Divisée en deux grandes parties, la pièce dure près de sept heures. On peut voir en ce moment les deux volets un soir sur deux au théâtre Buddies in Bad Times les soirs de semaine et en intégralité le week-end.
Le comédien Allister MacDonald rêvait de jouer Prior Walter depuis qu’il se destinait à cette carrière. Selon lui, cette pièce a une importance particulière, notamment pour les comédiens issus de la communauté LGBTQ+ qui voient dans l’œuvre de Tony Kushner un premier texte qui n’est pas qu’un stéréotype du gai drôle et amusant
.
Peut-on à la fois avoir du succès dans les affaires et, en même temps, monter une pièce aussi longue et riche qu’Angels in America?
Craig Pike est conscient du défi de s’attaquer à un texte écrit il y a presque 30 ans et qui a connu un immense succès depuis. Mais le metteur en scène pense qu’il est d’autant plus pertinent dans le monde dans lequel on vit aujourd’hui
.
Il souligne que montrer cette pièce dans le contexte multiculturel de Toronto ouvre aussi des perspectives.
La façon dont on vit le sida et le VIH en Occident est bien différente de comment le reste du monde peut la vivre, Angels in America peut être une réalité qui se déroule ailleurs aujourd’hui et des gens peuvent s’y reconnaître.
Faisant référence au manque d’action des autorités aux débuts de cette crise, Craig Pike pense que sa mise en scène ouvre la porte à la discussion : Que faire d’une information qui peut parfois nous pétrifier, et quelle décision prendre?

Allister McDonald et Kaleb Alexander dans la production de That Theatre présentée au Buddies in Bad Times.
Photo : Nathan Nash
Être au coeur de la communauté
De plus, Craig Pike sent une importance particulière à jouer ce texte dans l’un des plus anciens et plus importants théâtres queer du monde, qui plus est situé au cœur du village gai de Toronto. Cela a beaucoup de sens
, affirme-t-il.
Un sens qui parle à Allister McDonald. Pour lui, Buddies in Bad Times est Angels in America“,”text”:”tellement gai, tellement dans l’instant présent et même sordide, à l’image d’Angels in America”}}”>tellement gai, tellement dans l’instant présent et même sordide, à l’image d’Angels in America
.
La production mérite la visite, peu importe son genre ou son orientation sexuelle : c’est du grand théâtre, brillamment mis en scène. Sous la baguette du metteur en scène, Angels in America ressort dans toute sa profondeur et on est assuré d’une chose : quand Craig Pike se lance dans un sujet, que ce soit les biscuits ou le théâtre, il assure à 100 %.