Michel Bélair publie ces jours-ci, aux éditions Somme toute/Le Devoir, un recueil de ses textes parus depuis la fin des années 1960 : Théâtre en direct. 50 ans de création au Québec. Ici, un texte publié le 30 avril 1970, alors que l’auteur rencontrait Claude Gauvreau pour La charge de l’orignal épormyable.
Vous connaissez Claude Gauvreau ? J’en doute, à moins que vous fassiez partie des « happy few ». Autour de lui s’élève une sorte de conspiration du silence depuis sa dernière manifestation officielle en 1955 ou 1956 jusqu’à tout dernièrement, lors de la Nuit de la poésie. Silence presque complet. Le mur est épais et rien à date n’avait réussi à le traverser. Pourtant, Claude Gauvreau écrit encore — écrit toujours, devrais-je dire. Pourquoi cette « éclipse officielle », alors que Gauvreau produit sans cesse depuis 1945, et quelle est l’occasion de ce brusque retour à la surface ?
Tout se passe comme si ceux qui font l’activité littéraire en séparant « l’ivraie du bon grain », en définissant les auteurs importants et les parasites, ne voulaient laisser percer du personnage Gauvreau qu’une adhésion : celle au Refus global et celle au groupe de Borduas. Cela est parfois plus commode pour rendre compte d’une « époque littéraire », quitte à éliminer par le fait même un de ses représentants les plus authentiquement actuels. Refus global a certes été une étape importante pour Gauvreau, mais cela date de plus de vingt ans ! Si Gauvreau n’avait pas écrit autre chose depuis cette époque, le problème ne se poserait pas, il serait superflu de
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