La maltraitance des enfants fait malheureusement les manchettes un peu partout sur la planète et c’est justement le thème central de Trompe-l’œil. Ici, le jeune Lukas disparaît près de son école sans laisser de traces et la ville de Copenhague tout entière se trouve sous le choc. L’improbable duo formé par l’inspecteur Schäfer et sa protégée Heloïse Kaldan, journaliste d’enquête au Demokratisk Dagblad, se retrouvera encore une fois (voir Fleur de cadavre chez le même éditeur) autour de l’enquête sur la disparition du bambin.
L’affaire n’est pas simple et justifie d’emblée le titre de l’édition française. Surtout qu’Anne Mette Hancock s’amuse à brouiller les pistes en nous laissant croire à l’existence d’un désaxé prenant plaisir à torturer les enfants. N’empêche que, chacun de leur côté, Schäffer et Kaldan pédaleront dans la choucroute avant de remonter la piste et de trouver le véritable coupable.
En filigrane, une autre affaire, liée accessoirement à la disparition de Lukas, lève le voile sur certaines pratiques douteuses face à l’immigration : pas de surprise ici, c’est devenu le cas partout. Au fil de ces deux histoires parallèles, on trouvera finalement beaucoup de violence à peine contenue prenant, tiens, l’allure de petites vacheries ordinaires. Heureusement, la traduction rend bien la complexité et la souplesse d’une écriture d’abord efficace.
Fascismes divers
Ahmed Tiab a déjà une feuille de route impressionnante ; depuis Le Français de Roseville et Le désert ou la mer, ses deux ouvrages les mieux réussis, ses livres reposent sur des personnages solides, différents et attachants. Dans cet Entendez-vous dans les campagnes, revoici donc Lotfi Benattar, flic marseillais rescapé de justesse d’une difficile enquête (Pour donner la mort, tapez 1, chez le même éditeur toujours).
Benattar est envoyé par la Direction centrale de la police judiciaire à Verniers-en-Morvan, en Bourgogne, où l’on vient de retrouver le corps d’un adolescent de 16 ans, pour tirer au clair des disparitions signalées dans un centre de déradicalisation de la région. Maugréant contre le froid et le brouillard, physiquement diminué depuis que tous les os de son corps ont été fracassés, l’enquêteur comprendra rapidement à qui il fait face lorsqu’on découvre que le jeune homme a été assassiné.
En France, comme partout ailleurs, le radicalisme de droite s’infiltre dans tous les milieux et frappe chaque fois qu’il en a l’occasion, comme on peut le voir trop souvent dans les journaux de tous formats. Et lorsqu’on trouve bientôt un autre cadavre dans le village — celui d’un amateur de drone, cousin du jeune ado —, l’enquêteur ne mettra pas beaucoup de temps à faire le lien avec les trois personnes « de culture maghrébine » disparues du centre de déradicalisation. La triste vérité apparaîtra au grand jour dans une scène finale un brin cinématographique, et néanmoins efficace.
Tout au long, comme un tic, on notera des expressions en verlan qui n’apportent pas grand-chose au récit ; l’agacement mis à part, cela n’entache pas vraiment la qualité générale de l’ensemble. Ahmed Tiab sait raconter des histoires et son écriture est toujours aussi vive. On apprend toutefois, en concluant cet article, que le livre ne sera disponible au Québec que dans quelques petites semaines… Prenez-en note.
Juges et bourreaux
Avant de faire un burn-out, la commissaire Maxime Tellier a décidé de prendre du recul et de quitter la Brigade criminelle : trop de stress et de nuits sans sommeil. Trop de responsabilité face aux victimes aussi. Son « congé » remonte déjà à quelques mois quand s’amorce Le dernier procès de Victor Melki, alors qu’elle trouve sur le pas de sa porte une bizarre invitation à assister aux funérailles de quelqu’un dont elle n’a jamais entendu parler.
Comme elle a tout son temps entre les visites de ses ex-inspecteurs qui tentent de « lui remonter le moral », Max se rend à Grenoble pour assister à la cérémonie… et c’est là qu’elle fait connaissance avec l’ordalie, ce « jugement de Dieu » remontant aux rites païens d’avant même la chrétienté. Comprenant qu’elle vient d’aborder quelque chose d’énorme, elle fait appel au capitaine Antoine Brémont, du Département des sciences du comportement de la gendarmerie… qui accepte de mener une enquête discrète à ses côtés.
Celle-ci sera longue et difficile, puisqu’ils découvrent bientôt une vaste organisation qui soumet à l’ordalie les gens acquittés de crimes violents pour cause de non-responsabilité. On vous laisse découvrir cette histoire tordue fort bien racontée malgré quelques tics d’écriture agaçants.
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