
Politiques inadaptées, financements déficients, fréquentation en baisse : les signaux de crise se multiplient dans le système culturel québécois. Le Devoir poursuit sa série pour documenter les maux de cette crise et leurs remèdes. Dans cet article : les droits d’auteur à l’ère numérique.
Testons les machines. À la requête demandant d’imiter un incipit d’un éventuel nouveau livre de la saga Les Chevaliers d’Émeraude, de l’autrice québécoise Anne Robillard, Llama, intelligence artificielle (IA) générative de Meta, obéit en une fraction de seconde en livrant ceci : « Alors que les ténèbres menaçaient de recouvrir le royaume, un nouveau chevalier émergea des ombres, prêt à défendre l’Émeraude et à affronter les forces du mal. »
Le test du plus connu des robots conversationnels, ChatGPT, donne des résultats encore plus impressionnants. Au terme de sa réponse, la machine va jusqu’à proposer de générer « un titre, une suite de chapitres ou même une intrigue complète ».
Sitôt l’idée acceptée apparaît le résumé d’un éventuel tome XIII, L’héritier des Brumes, avec un canevas de plusieurs paragraphes qui commence par ces phrases : « Plusieurs décennies après la défaite d’Asbeth et la réunification des peuples libres, une paix relative règne sur les royaumes d’Enkidiev. Pourtant, dans les terres oubliées de l’Est, au-delà des monts de Cendre, une ancienne magie refait surface… »
Pas besoin de Merlin pour présumer qu’il faut avoir avalé et digéré tous les livres de la saga pour pouvoir régurgiter ces pastiches de haut niveau. Chose certaine : Anne Robillard n’a jamais donné son autorisation pour entraîner un programme informatique — ceux-là ou d’autres — avec ses ouvrages toujours protégés par le droit d’auteur.
L’autrice québécoise a donc demandé une autorisation d’exercer une action collective contre Meta Platforms, de Californie, en Cour supérieure du Québec. Selon les documents déposés le 25 mars 2025, la compagnie américaine exploite des ensembles de données contenant des copies illicites d’œuvres protégées et les modèles d’IA génératives produisent ensuite du contenu pouvant remplacer le travail des auteurs, et donc limiter leur capacité à gagner des revenus.
Des poursuites semblables sont engagées aux États-Unis, notamment par l’auteur à mégasuccès George R.R. Martin (à l’origine de la saga Game of Thrones) depuis septembre 2023. Sa
[...] continuer la lecture sur Le Devoir.