Image

«Impromptu»: l’humour caustique façon Catherine Mavrikakis

Le Devoir Lire

Depuis longtemps, le débat de l’idée de s’affranchir du Canada. , peut-être, a oblitéré sa quête de souveraineté vis-à-vis de l’impérialisme culturel européen. Le plus récent texte de , Impromptu, se moque de l’admiration des sphères intellectuelles québécoises pour le Vieux Continent en incarnant un vieux professeur allemand qui maintient un ascendant sur sa talentueuse élève.

« J’avais pris l’habitude, dans ma fréquentation assidue des textes littéraires de langue allemande, de ne m’étonner de rien. » Voilà ce qu’admet Caroline Akerman-Marchand, narratrice de ce court roman, dont la vie — faut-il s’en étonner ? — bascule dans la banalité d’un guichet automatique.

C’est là que, par une journée caniculaire, elle rencontre Karlheinz Mueller-Stahl, son professeur de littérature allemande romantique. L’éminent intellectuel flotte dans son parfum Guerlain, lui conférant un charme désuet, qui exerce néanmoins une forte impression sur l’étudiante. Ce premier dialogue, truculent, donne le ton de leur « entretien infini » : une relation inégale où le maître décharge tout son savoir sur l’étudiante assoiffée.

L’humour acerbe de Mavrikakis traverse le texte, niché dans ses craques et se présentant à nous de façon inopinée. La grandeur de l’Europe est campée dans l’ironie : « Nous sommes le premier juillet, c’est la fête du Canada. Un jour férié. Un peu comme le 14 juillet en , toutes proportions gardées, bien sûr. »

C’est par la figure du professeur que les formules caustiques de l’ marquent les plus grands coups. Savant, certes, mais radin, égocentrique et cynique, il incarne la nostalgie d’une Europe fantasmée : « Oui, je suis très vieille Allemagne en fait, celle dont vous ne pourriez vous souvenir, mais que vous ne connaissez d’ailleurs pas, puisque votre génération n’entretient aucun rapport avec le passé. »

Cette petite envolée impromptue prend parfois les allures d’une cruelle farce. La littérature flirte avec le désenchantement et les générations s’affrontent dans un choc stérile, mais dans ce grand rire se dessine une autre quête, plus personnelle : celle d’une intellectuelle qui, reconnaissante de son héritage, revendique sa propre indépendance.

  

Impromptu

★★★★

Catherine Mavrikakis, Héliotrope, , 2022, 72 pages

À voir en vidéo

[...] continuer la lecture sur Le Devoir.

Palmarès des livres au Québec

Laissez un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *