
Avec Antonine Maillet, dont le décès vient d’être annoncé lundi, ce n’est rien de moins que l’âme de la littérature acadienne contemporaine qui disparaît. Elle a lancé, accompagné et incarné la renaissance de la culture de l’Acadie de même que sa reconnaissance internationale. Son œuvre complète, déployée par une grande érudite doublée d’une fabuleuse conteuse sur une cinquantaine d’ouvrages, décortique, expose et célèbre l’histoire et la langue de sa petite nation francophone des Amériques.
Antonine Maillet s’est éteinte « paisiblement » dans la nuit du 17 février à son domicile montréalais, selon le communiqué émis par son éditeur Leméac. Elle avait 95 ans.
Dramaturge, romancière (y compris pour les enfants), traductrice de Shakespeare et de George Bernard Shaw, elle a acquis sa renommée canadienne avec la pièce La Sagouine (1971) et s’est fait connaître dans toute la Francophonie en remportant le prestigieux prix Goncourt avec Pélagie-la-Charrette (1979). Elle reste la seule écrivaine du pays (Québec y compris) à avoir reçu cet honneur, qui lui a permis d’écouler un million d’exemplaires de son roman.
Antonine Maillet naît à Bouctouche, au Nouveau-Brunswick, le 10 mai 1929. Elle se décrit comme « une enfant turbulente » et comme une grande lectrice amoureuse des contes et du folklore. Elle assume cette passion en étudiant en lettres au collège Notre-Dame d’Acadie, où elle dirige le journal étudiant, puis à l’Université de Moncton. « Lorsque j’ai reçu mon baccalauréat, en 1950, nous n’étions que quatre filles parmi toute la cohorte de garçons, a-t-elle rappelé bien plus tard. Mère Jeanne de Valois nous a alors dit à toutes les quatre : “L’Acadie n’existera peut-être plus dans 50 ans, mais si elle existe encore, ça va dépendre de vous, les femmes, parce que c’est vous qui assurerez l’éducation en Acadie.” »
Antonine Maillet rend hommage à cette figure tutélaire dans Les confessions de Jeanne de Valois (1992) en revenant sur une année dans la vie de la religieuse et pédagogue acadienne (1899-1995), fondatrice du collège Notre-Dame. L’élève diplômée enseigne la littérature dans son alma mater pendant quelques années, publie deux romans, Pointe aux Coques (1958) et On a mangé la dune (1962), et s’installe au Québec pour défendre un doctorat sur Rabelais, d’abord à l’Université de Montréal, puis à
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