La guerre qui fait rage aux portes de l’Europe réveille les fantômes d’autres conflits, qui ont parfois marqué la littérature. À la fois écrivains et soldats, ils ont raconté ce qu’ils ont vu, écrit leurs traumatismes et leurs désillusions. Pour ce quatrième texte de notre série «Écrivains dans les tranchées », Le Devoir se penche sur Vassili Grossman et Curzio Malaparte.
À l’exemple de l’écrivain russe Vassili Grossman (1905-1964), la guerre peut être parfois pour un écrivain le moment d’une double révélation.
Pour l’auteur de Vie et destin, l’un des plus grands romans du XXe siècle, la Seconde Guerre mondiale aura ainsi été un tournant, autant dans sa vie que dans son oeuvre.
Chimiste de formation — comme Primo Levi —, écrivain adoubé en 1934 par Maxime Gorki (« l’ingénieur des âmes humaines », dira Staline), membre en règle de l’Union des écrivains soviétiques dès 1937, suivant sans trop broncher la ligne du parti, Vassili Grossman a traversé sans mal les années de la Grande Terreur, des procès-spectacles, des déportations et des exécutions massives.
L’époque était pourtant dévastatrice, et les écrivains ont été durement touchés : sur les 700 auteurs réunis pour le premier Congrès des écrivains — pendant lequel a été proclamée la fameuse doctrine du « réalisme socialiste » —, seulement 50 étaient encore en vie au moment du second congrès, en 1954. « C’était un temps où ne souriait / Que le mort, heureux de son repos », écrira Anna Akhmatova.
En juin 1941, Vassili Grossman, « écrivain officiel » de 35 ans, se porte volontaire pour combattre dans l’Armée rouge, après
[...] continuer la lecture sur Le Devoir.