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Michelle Zauner à la recherche du temps perdu

 

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En 2014, en apprenant que sa mère était atteinte d’un cancer de stade IV, Michelle Zauner a mis sa vie entre parenthèses — Philadelphie, la musique, son chum et ses trois jobs — pour rentrer en Oregon et l’accompagner dans son combat contre la maladie.

C’était pour elle l’occasion de rattraper le temps perdu, pour emmagasiner des souvenirs. Peut-être même aussi pour renouer avec sa mère, avec qui les relations n’étaient pas toujours faciles.

Pour l’Américaine, née à Séoul en 1989 d’une Coréenne et d’un Américain, les souvenirs liés à sa mère auront à jamais un goût de chou fermenté ou d’huile de sésame. Tous les deux ans, pendant son enfance, elle passait six semaines d’été seule avec elle dans la capitale coréenne, en plein cœur du quartier de Gangnam. Tout un contraste pour elle, qui a grandi « coincée au milieu des bois » dans l’Oregon.

C’est ce qu’elle raconte dans Pleurer au supermarché (Christian Bourgois, 2024, en vente en édition de poche dès le 4 juin), qui a été récompensé jeudi par le Prix des libraires du Québec dans la catégorie Roman, nouvelles ou récit hors-Québec — décerné l’année dernière à l’écrivaine franco-mexicaine Neige Sinno pour Triste Tigre.

Le titre original du récit, Crying in H Mart, fait référence à une chaîne américaine bien connue de supermarchés coréens où « personne ne range les boîtes de haricots en conserve Goya à côté des bouteilles de sriracha ».

Récit d’apprentissage, livre de deuil, exploration des rapports mère-fille, carnet de voyage culinaire coréen, essai sur la réalité asio-américaine, Pleurer au supermarché a figuré pendant un an sur la liste des meilleures ventes du New York Times.

« J’ai été certainement surprise par la popularité du livre. J’avais le sentiment qu’il pourrait résonner auprès de certaines personnes, mais peut-être pas à ce point-là. Il a réussi à transcender le fait d’être lié à une minorité ethnique déterminée. Je pense que c’est ce à quoi toute personne dans ma position aspire », confie l’autrice et musicienne Michelle Zauner, quelques jours avant son passage à Montréal pour recevoir le prix, décerné chaque année depuis 1994 or l’Association des libraires du Québec.

Comme elle possède avec son compagnon, le guitariste Peter Bradley, une maison de campagne dans le nord de l’État de New York, il lui arrive, raconte-t-elle, de faire des incursions à Montréal, où elle aime fréquenter des endroits comme le marché Jean-Talon, dans la Petite Italie, et la librairie Drawn & Quaterly, dans le Mile End. Michelle Zauner s’est aussi produite à quelques reprises à Montréal avec Japanese Breakfast, le band d’indie pop formé en 2013 dont elle est chanteuse et guitariste. Le groupe, qui a fait les premières parties de Florence and the Machine, The National et Yeah Yeah Yeahs, a reçu deux nominations aux Grammy pour l’album Jubilee en 2022.

Le succès du livre ne finit pas de l’étonner. « Une personne sur trois va recevoir un diagnostic de cancer à un moment donné de sa vie, ce qui signifie aussi que beaucoup d’autres vont être aidants pour quelqu’un atteint de cancer. Tout le

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