Paru en premier sur (source): journal La Presse
(Lima) « Génie des lettres » ou « monstre de la littérature » : les éloges et réactions continuent d’affluer lundi, au lendemain du décès à Lima du prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa à l’âge de 89 ans, qui marque la fin de la génération dorée de la littérature latino-américaine.
Publié à 15 h 16
Le gouvernement péruvien a décrété un jour de « deuil national » lundi et mis en berne les drapeaux sur les bâtiments publics en hommage à l’auteur de chefs d’œuvres tels que Conversation à la Catedral ou de La fête au bouc.
Issu d’une famille de la classe moyenne péruvienne, l’écrivain hispano-péruvien s’est imposé comme l’une des figures majeures du boom littéraire latino-américain des années 1960 et 1970, aux côtés du Colombien Gabriel García Márquez et de l’Argentin Julio Cortázar.
Sa famille a annoncé dimanche soir son décès sans préciser les causes de sa mort. Sa santé était fragile depuis son retour à Lima, après avoir quitté Madrid en 2024. Depuis quelques mois, le lauréat du prix Nobel vivait en retrait de la vie publique.
Aucune cérémonie publique n’est prévue, a indiqué la famille du romancier, précisant que sa dépouille serait incinérée conformément à ses dernières volontés.
La présidente péruvienne Dina Boluarte, vêtue de noir, s’est rendue à la veillée funèbre au domicile du défunt, dans le quartier bohème de Barranco, pour présenter ses condoléances au nom du gouvernement.
Elle a été accueillie à la porte de l’immeuble par le fils aîné de l’écrivain, Álvaro Vargas Llosa. Une longue accolade a précédé leur entrée dans le bâtiment. Aucune déclaration n’a été faite aux journalistes sur place.
Dans la soirée, quelques admirateurs s’étaient rassemblés devant l’immeuble, tenant des œuvres de l’écrivain à la main.
« Infinie gratitude »
Les éloges et hommages ont afflué du monde entier.
« Nous avons reçu des messages de toute l’Amérique latine, des États-Unis, de l’Europe, de l’Asie et du Moyen-Orient », a déclaré lundi à la presse Alvaro Vargas Llosa, disant son « infinie gratitude ».
Le Comité du Prix Nobel a notamment rappelé qu’il avait décerné le Prix Nobel de littérature à Mario Vargas Llosa en 2010 « pour sa cartographie des structures de pouvoir et ses images mordantes de la résistance, de la révolte et de la défaite de l’individu ».
« La littérature hispanophone fait ses adieux à Mario Vargas Llosa, maître universel du mot », a réagi sur X le premier ministre espagnol Pedro Sanchez, soulignant son « immense œuvre et tant d’ouvrages essentiels à la compréhension de notre époque ».
Dans les rues de la capitale, nombreux étaient aussi les admirateurs à lui rendre hommage.
« Je me souviens de Mario Vargas Llosa comme d’un monstre de la littérature latino-américaine et mondiale », raconte à l’AFP Oscar Trelles, un employé de 60 ans rencontré près d’un kiosque à journaux.
Les librairies ont ouvert en mettant en vitrine les œuvres de Vargas Llosa, tandis qu’au collège militaire Leoncio Prado, où l’écrivain a étudié et qui constitue le décor de son roman La ville et les chiens, les cadets lui ont rendu hommage en formant, en rangs serrés, les initiales du Nobel : MVLL.
Traduit en une trentaine de langues, Vargas Llosa, auteur francophile qui a vécu plusieurs années à Paris, a été le premier écrivain étranger à entrer de son vivant dans la prestigieuse collection de la Pléiade en 2016.
Une entrée qui « fut pour lui très importante », a souligné l’éditeur français Antoine Gallimard dans un communiqué transmis à l’AFP, « car elle représentait l’espoir et le signe d’une confraternité entre écrivains et lecteurs. »
Élu à l’Académie française en 2021, Vargas Llosa était le « romancier des tyrannies, des servitudes et des émancipations », a-t-il ajouté. « Son œuvre est descriptive, critique et audacieuse. Elle exprime la beauté et l’espoir dans le chaos du monde tel que nous le ressentons ».
Le président français Emmanuel Macron a salué sur X le « génie des lettres » qui avait en France « une patrie » et qui avec son œuvre « opposa la liberté au fanatisme, l’ironie aux dogmes, un idéal farouche face aux orages du siècle ».