Paru en premier sur (source): journal La Presse
« Je porte la soupe avec une lenteur prudente, concentrée sur le liquide orangé valsant doucement dans le contenant de plastique », raconte la narratrice d’On a tout l’automne. Avec une lenteur prudente, comme celle que l’on adopte lorsque l’on porte de la soupe : ainsi pourrait-on décrire l’écriture patiente, sobre et scintillante de Juliana Léveillé-Trudel.
Publié à 17h00 ✓ Lien copié Dominic Tardif La Presse
Sept ans après le grand succès de Nirilit (2015), l’écrivaine renoue avec le Nunavik. La jeune femme de son premier roman retourne à Salluit afin de donner des ateliers de poésie à des enfants. Elle retrouve par le fait même les gamines du camp de jour dont elle a pris soin lors de sa première visite. C’était hier et pourtant, les voilà toutes déjà bien enfoncées dans les tracas de l’adolescence, pour ne pas dire de l’âge adulte, leur insouciance éclipsée par une fatigue prématurée. Derrière elle, à Montréal, son amoureux Gabriel l’attend sans s’en faire, pendant qu’elle retrouve à la fois un territoire et des gens, avec la volonté d’apprendre leur langue, afin d’apprendre à réellement les connaître.
Roman porté par un double mouvement grâce auquel la vie intérieure de sa narratrice dialogue avec l’arrivée de l’hiver qui, à l’extérieur, s’installe tranquillement, On a tout l’automne accomplit sans esbroufe un petit tour de force, en ce qu’il dépeint un peuple dans ce qu’il a de singulier, sans l’essentialiser, et en contournant les archétypes. Juliana Léveillé-Trudel arrive à nommer les drames qui secouent les communautés du Nord, mais ne succombe pas au piège de cette pornographie de la tragédie sur laquelle débouche trop souvent cette volonté de