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À Hawkesbury, s’élève un bâtiment aussi ambitieux que l’homme qui l’a rêvé. La distillerie Artist in Residence (AiR) impressionne par sa stature — tout comme son fondateur, Pierre Mantha, un entrepreneur à la démesure assumée.
Il aurait pu tout laisser tomber. Reculer. Ranger ses idées folles dans un tiroir fermé à clef. Mais Pierre Mantha a décidé de créer une distillerie qui ne ressemble à aucune autre, qui dérange un peu et ne suit pas les règles ni les modèles établis.
Une distillerie en mouvement, comme lui.
Pierre Mantha traversait une période sombre quand il a posé les premières pierres de ce projet un peu fou. Après une dépression, le mécanicien qu’il était alors a senti le besoin de changer de route.

Des travaux d’agrandissement sont prévus en avril 2026 à la distillerie de Hawkesbury.
Photo : Radio-Canada / Félix Desroches
C’est ainsi que sont nées ses premières distilleries , d’abord à Gatineau en 2017, puis à Hawkesbury sept ans plus tard. L’ouverture d’une succursale d’AiR aux États-Unis s’ajoutera peut-être bientôt.
Pierre Mantha rêve grand. Et il prend les moyens pour concrétiser, en redonnant vie à des bâtiments délaissés, en faisant travailler des gens de la région et en créant des lieux chaleureux et rassembleurs. Je veux qu’on entre chez AiR comme on entre dans un café de quartier
, explique-t-il.

Le whisky à l’érable fumé distillé à Hawkesbury
Photo : Radio-Canada / Félix Desroches
Il voit par ailleurs son whisky à l’érable fumé comme un de ses produits signature. Un produit qui prend du temps, du soin, de l’humilité à préparer. Il le goûte déjà dans sa tête, avant même qu’il ait vieilli en fût. C’est ça, être un visionnaire, selon lui : sentir le potentiel de ce qui n’existe pas encore. Et y croire plus fort que tout le monde.
En plus de son whisky à l’érable fumé, sa vodka aux mûres a trouvé une place sur les tablettes de la LCBO, il y a environ un mois. Il aurait espéré, comme artisan local, obtenir un meilleur appui de la société d’État pour accueillir davantage de produits. J’ai pas eu ça pantoute! Je pensais que je venais de Dubaï!
, déplore-t-il avec ironie, ajoutant que ça fait partie du jeu.
Un rêveur inépuisable
Franc, voire brut en certaines occasions, Pierre Mantha ne s’avère pas un rêveur déconnecté. Il parle ouvertement de ses erreurs, de ses échecs, des moments où il a failli perdre le contrôle.
Des fois, je vais souvent vite, mais je suis capable de me retourner sur un cinq cennes et me reprendre
, assure l’homme d’affaires, qui voit une force à sa capacité de rebondir devant les gros joueurs du milieu.
Il a essuyé des pertes financières, pris de mauvaises décisions en faisant ses premiers pas dans le monde du gin, vu des portes se refermer. À chaque fois, il est revenu à la charge avec une nouvelle idée. Plus folle, parfois. Plus risquée, souvent. Mais toujours avec cette même fougue contagieuse.

Pierre Mantha concède avoir fait beaucoup d’erreurs et est conscient qu’il en fera encore.
Photo : Radio-Canada / Félix Desroches
J’adore ce que je fais et la vie est courte. Je fonce. Je suis un junkie d’adrénaline.
Aujourd’hui, AiR est bien plus qu’une distillerie, pour Pierre Mantha : c’est un état d’esprit. Un projet en perpétuelle évolution. L’homme d’affaires est toujours en train de penser au prochain coup. Il parle de tequila canadienne, de nouveaux marchés, d’exportation, de collaboration avec des artistes. Il veut surprendre. Rassembler. Réinventer.
Il désire surtout rester libre de se tromper, d’oser. De croire que, même à 50 ans passés, on peut encore bâtir quelque chose de beau. Quelque chose comme un empire.
Car, baril après baril, Pierre Mantha distille bien plus que de l’alcool : il distille des rêves.