À la fin du XIXe siècle, accrochés à leur caillou de feu et de glace, essayant de survivre aux éruptions volcaniques, aux inondations ou aux avalanches, la plupart des Islandais vivaient dans un état proche de l’esclavage, misérables et moyenâgeux.
Voilà ce qu’était l’Islande depuis mille ans : le pays le plus pauvre, le plus froid, le plus sombre d’Europe.
De retour dans son fjord enserré de montagnes vertigineuses à la veille de Noël, après être parti quelques jours pour aller acheter trois kilos de farine à crédit au marchand le plus proche, Eilífur Guðmundsson découvre qu’une avalanche a détruit sa petite maison de tourbe, tuant sa femme et sa fille de cinq ans. Seul a survécu son fils de deux ans, Gestur.
Après une tentative avortée d’immigrer en « Amrique », espérant fuir la misère, l’homme devra laisser son fils en gage au marchand qui lui avait vendu la farine le temps d’aller pêcher le requin pour rembourser sa dette.
Une activité dangereuse, plus proche de la roulette russe que de la promenade en mer. Bon an mal an, la « réalité brutale » prélevait son dû : la moitié de la flotte faisait naufrage. Le petit Gestur ne reverra pas son père.
« Les autres nations disposaient de leurs armées pour assouvir leur folie et leur désir de mort, quant à nous, nous avions le requin », raconte le narrateur de Soixante kilos de soleil, cinquième livre traduit en français du romancier, poète, peintre et traducteur islandais Hallgrímur Helgason (on se souviendra peut-être de 101 Reykjavik, Actes Sud, 2002).
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