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Un nouveau livre pour la grande Margaret Atwood



 

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Source du texte: Lecture

L’écrivaine canadienne .

Photo : Luis-Mora

Publié à 13 h 11

À 82 ans, l’écrivaine culte et intellectuelle canadienne Margaret Atwood a récemment publié Questions brûlantes Le monde vu par Margaret Atwood, qui réunit une cinquantaine ses écrits portant sur la crise climatique, les menaces contre la démocratie, la technologie, la liberté, et bien sûr le féminisme. Céline Galipeau s’est entretenue avec elle pour le Téléjournal 22 h.

De toutes les grandes questions qui animent actuellement le monde, Margaret Atwood considère que la plus brûlante est celle du changement climatique, et de tous les problèmes qui en découlent. 

Toutefois, elle voit des signes encourageants dans la prise de conscience de cet enjeu par le public et les tentatives d’inventer de nouvelles technologies ou encore d’autres façons de vivre pour répondre à cette crise. 

La question est : serons-nous assez rapides? Et est-ce que les gouvernements vont suffisamment soutenir ces programmes afin qu’ils réussissent?, a-t-elle expliqué à Céline Galipeau. 

Nous sommes dans une course contre la montre, mais nous ne manquons ni de réflexion et d’inventions dans ce sens, ni de volonté publique, a-t-elle ajouté. 

Donc, voit-elle l’avenir avec espoir? Toujours, parce que, sans espoir, on ne fait rien.  

Dans l’immédiat, Margaret Atwood observe avec angoisse la guerre sévir en . Née en novembre 1939, soit deux mois après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, elle a été marquée par l’anxiété que ce conflit armé a fait naître chez les adultes qui l’entouraient ainsi que par le traumatisme qu’il a engendré.

On ne peut pas parler du 20e siècle et laisser de côté les première et deuxième guerres mondiales qui sont des événements ayant façonné le monde. Et nous voyons un autre de ces événements en Europe en ce moment.  

Couverture de livre en blanc et noir

« Questions brûlantes », de Margaret Atwood, est publié aux éditions Robert Laffont.

Photo : Facebook/Éditions Robert Laffont

Le combat pour l’avortement

Margaret Atwood se dit préoccupée par la manière dont la crise engendrée par la pandémie de COVID-19 a déstabilisé nos sociétés, par les dérives totalitaires ainsi que par le recul des droits des femmes. 

Si elle considère que la décision de la Cour suprême des d’invalider l’arrêt c. , qui protégeait le droit à l’avortement à l’échelle du pays, était prévisible, elle constate que le choc causé par cette nouvelle ravive la mobilisation des femmes à défendre leurs droits. 

C’est ce qui s’est passé, dit-elle, au Kansas où les femmes sont allées en nombre s’enregistrer pour voter à un référendum sur la question du droit à l’avortement organisé en août dernier. Résultat, la majorité des électeurs et électrices ont voté en faveur de la garantie constitutionnelle du droit à l’avortement dans cet État pourtant conservateur. 

Quand les gens sentent que leurs droits sont sérieusement menacés, cela les motive à voter et se battre, a-t-elle expliqué, dressant un parallèle avec la vigueur du mouvement féministe plus forte au Québec que dans le reste du Canada, dans les années 1970.

Cette génération de femmes au Québec sait ce à quoi elle résistait et ce dont elle voulait se débarrasser, parce que leurs mères et elles, quand elles étaient enfants, avaient vécu sous le contrôle de et de l’église [catholique], a-t-elle précisé.

L’absence de droit à l’avortement, un esclavage pour les femmes

Pour Margaret Atwood, priver les femmes de la liberté de décider si elles veulent enfanter ou non les réduit à un état d’esclave. Oui, parce que l’État revendique le contrôle de leur corps sans même les payer pour ça.

Elle compare la situation des femmes à celle des hommes subissant la conscription militaire. Dans ce cas, l’État prend aussi possession de leurs corps, mais les soldats sont logés, nourris, équipés et leurs soins sont pris en charge.

« Si on force les femmes à avoir des enfants, on devrait au moins les payer pour ça. »

— Une citation de  Margaret Atwood, écrivaine

La servante écarlate, une dystopie qui n’est plus de la pure fiction

Dans Questions brûlantes Le monde vu par Margaret Atwood, la romancière revient sur les raisons qui l’ont poussée à écrire La servante écarlate, qui s’est écoulé à 8 millions d’exemplaires et a été adapté en série à succès par la suite. 

Si elle se défend d’avoir écrit un roman prémonitoire – je n’ai pas de pouvoirs surnaturels, je ne peux pas prédire l’avenir –, force est de constater que l’histoire qu’il raconte paraît moins invraisemblable qu’à sa parution en 1985.

À l’époque, il était difficile d’imaginer le futur dystopique, dans lequel les femmes sont asservies par un régime totalitaire protestant et sont forcées de procréer, décrit dans La servante écarlate. Les États-Unis se voyaient comme la plus grande démocratie au monde, et ce genre de choses ne pouvaient pas se produire là-bas.

Je n’ai jamais cru que cela ne pouvait pas arriver. Tout peut arriver partout, selon les circonstances.

Quand Margaret Atwood a commencé à songer à son roman au tout début des années 1980, Ronald venait d’arriver à la Maison-Blanche et menait une politique néolibérale démantelant un filet social créé dans les années 1930 avec la politique du New Deal. Et la droite religieuse fondamentaliste était en voie de devenir une force politique. 

Je crois que les gens vont faire ce qu’ils disent vouloir faire s’ils en ont le pouvoir, a-t-elle expliqué à Céline Galipeau. Alors ma question était, si le but est de ramener les femmes à la maison alors qu’elles ont toutes désormais un emploi et des cartes de crédit, comment y parvenir?

Et l’autre question était, si les États-Unis devenaient une dictature totalitaire, quelle forme prendrait-elle? Pas celle du communisme, selon Margaret Atwood, qui pense que trop peu de personnes soutiendraient cette option. Pour elle, la réponse se trouve du côté de la religion. 

Au 18e siècle, la Nouvelle-Angleterre a débuté comme une théocratie. Alors les fondations sont là, elles n’ont jamais vraiment disparu , a-t-elle expliqué. 

[Agir] selon la volonté de Dieu, c’est bien ce qu’ils essaient de faire en ce moment , a-t-elle ajouté. Et pas seulement aux États-Unis. 

#MoiAussi : attention aux potentiels abus

Les servantes écarlates imaginées par Margaret Atwood sont devenues des icônes féministes. Souvent, des femmes revêtent la longe robe rouge et le couvre-chef blanc que portent ces personnages pour manifester en faveur des droits des femmes. En 2018, Suis-je une mauvaise féministe? , s’est pourtant interrogée Margaret Atwood, dans une tribune publiée dans The Globe and Mail, après avoir été critiquée pour avoir relayé, sur les réseaux sociaux, des articles parlant des excès du mouvement #MoiAussi. 

Devrait-on accuser quelqu’un sans preuve?Je critique le fait que cette accusation soit équivalente à une condamnation , a-t-elle souligné, mettant en garde contre le risque d’abus. 

Toutefois, elle juge que le mouvement #MoiAussi a eu bien plus de répercussions positives que négatives, permettant de libérer la parole des femmes bien que celles qui osent parler soient victimes de propos haineux. 

Nous vivons encore dans un climat très misogyne. Les femmes se heurtent à un barrage d’agressions dirigées contre elles, en général sur Internet.   

Le pouvoir des jeunes femmes

À plus de 80 ans, Margaret Atwood a-t-elle un message à adresser aux femmes de la jeune génération? 

Aux Iraniennes, qui se révoltent actuellement contre la répression liée au port du voile dans leur pays, elle leur dit : Ils ne peuvent pas toutes vous tuer

C’est une révolution menée par de jeunes femmes, mais soutenue par les hommes. Je ne pense pas qu’on ait déjà vu ça avant, s’est-elle félicitée.

Aux autres, Margaret Atwood leur rappelle leur pouvoir d’influence sur l’avenir de la société. Si les jeunes femmes décident qu’avoir une voiture électrique est à la mode, le marché va vite beaucoup changer, a-t-elle souligné.

« [Les jeunes femmes], vous êtes essentielles. Vous avez beaucoup de pouvoir.  »

— Une citation de  Margaret Atwood, écrivaine

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