Les outardes ont regagné notre ciel, célébrant les premiers jours du printemps et l’élan renouvelé de nos cœurs. Là-bas, sur un autre continent, et pourtant tout près, dans notre chair de poule, la détonation de bombes absurdes fait trembler la terre. Voici six titres pour trouver refuge et s’ancrer dans ce qui vit.
La fierté de Bologne
C’est cette semaine que la Foire du livre jeunesse de Bologne a dévoilé les lauréats de ses prix. La maison indépendante Monsieur Ed y est, pour l’occasion, dépositaire de notre fierté nationale, puisqu’elle a remporté la catégorie Meilleur éditeur jeunesse – Amérique du Nord. Dans la foulée de cette grande nouvelle, elle publie l’album Je vous attendrai au bord de la mer, de Taltal Levi.
Ce récit intimiste s’invite dans le quotidien de Charlie qui, dans le branle-bas de sa maison, se sent invisible. Elle entreprend alors une excursion vers cet endroit près de la mer qui, par sa familiarité, la réconforte. La route comporte son lot de défis, mais armée de sa solitude et d’une volonté qu’elle apprend à découvrir, elle y retrouve, sereine, ceux qu’elle « aime le plus au monde ». Un voyage initiatique qui va à l’essentiel, accompagné d’illustrations immersives au trait dynamique, qui ajoutent du mouvement à l’aventure.
La violence est humaine
C’est ce mois-ci que paraissent les deux premiers titres de la très attendue collection Romans des éditions D’eux. Au Sudie de Sara Flanigan et de Pierre Pratt s’ajoute le roman de Roald Dahl, Le cygne. On retrouve Ernie, « un grand gaillard mal dégrossi qui fêtait ce jour-là ses quinze ans ». Son père lui a offert une carabine et, avec son ami Raymond, il gagne la magnifique campagne près de son village. Après avoir abattu bon nombre d’oiseaux, ils tombent sur Peter Watson, qui observe paisiblement un pivert. Peter, premier de classe, « petit et frêle », a toujours été leur ennemi.
À l’abri des regards, à la pointe de leur fusil, Ernie et Raymond déversent sur Peter le fiel encrassé de leur vie misérable. Les protagonistes se livrent alors un duel inégal, où Peter Watson emploie toute la force de sa résilience pour résister à la cruauté et au harcèlement qu’il subit. Une puissante réflexion sur la violence, à laquelle Jean Claverie offre ses aquarelles, délicates et magnifiques, qui insufflent une troublante beauté.
Le secours des mots
Une autre collection voit le jour ce mois-ci. Boréal se lance dans une nouvelle aventure, ajoutant à sa trousse la collection Brise-glace, qui réunira des suites poétiques destinées à un public d’adolescents et de jeunes adultes. Deux titres en lever de rideau : Tiens-toi droite, de Lucile de Pesloüan, et Kaléidoscope mon cœur, de Kristina Gauthier-Landry.
La jeune protagoniste de Kaléidoscope mon cœur est hypersensible, sensible aux moments de grâce, mais en proie aux troubles d’anxiété. Le regard des autres lui brûle la peau : « Tout le monde vraiment / tout le monde / porte à son cou / la même pancarte / discrète / une affichette / sur laquelle on peut lire / aimez-moi. » Une poésie minimaliste mais vibrante qui s’invite au cœur de la marge, pour que les mots se dépouillent de leur lourdeur et s’envolent avec la protagoniste : « Je finis toujours / par tasser les meubles / danser pieds nus / sur les fleurs du tapis. »
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