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L’autrice et chroniqueuse Catherine Éthier fait partie du jury du Prix du récit Radio–Canada 2022. Photo : Julie Artacho Lisa Marie Noël Même si Catherine Ethier vit de son écriture depuis des années, rédiger son premier roman a été toute une épreuve. Après une journée de travail à écrire pour la radio ou la télé, elle était vidée et croyait n’avoir plus rien d’intéressant à raconter. « Pourquoi le monde lirait ça? », se demandait-elle. La réponse est arrivée rapidement après la publication d’Une femme extraordinaire, en 2022. Les gens l’ont lu. Beaucoup de gens. Son livre s’est hissé au premier rang du palmarès des ventes du site Les libraires, qui regroupe plus de 100 librairies indépendantes. Une femme extraordinaire est un succès-surprise pour elle. « Des fois, j’ai le trac au milieu d’une page. C’est comme si je voulais tout annuler et aller faire mon cours de fleuriste… » Son livre est une fiction. Mais comme le personnage ressemble drôlement à son autrice, les gens ont évidemment fait des rapprochements. Le roman raconte l’histoire de Corinne Gazaille, une jeune trentenaire qui semble avoir tout pour être heureuse. En apparence seulement. En coulisses, elle doit composer avec la dépression et l’anxiété.Je ne m’attendais pas à ce que ça résonne autant […] Je ne m’attendais pas non plus à ce qu’il y ait autant de gens qui se confient à moi
, dit-elle.
La page couverture du livre de Catherine Ethier, publié par les éditions Stanké
Photo : Facebook/Stanké
Catherine Ethier avait envie d’exploiter le thème du mal de vivre, un sujet qui la touche, ainsi que sa famille, depuis longtemps. Parler des choses plus taboues, comme le mal de vivre et les idées suicidaires, fait partie de moi. Si je n’avais pas connu ça, j’aurais peut-être eu une certaine pudeur.
« Des fois, en abordant ces sujets, ça nous unit. Cela ouvre une petite fenêtre dans une maison un peu sombre. »
Elle a l’habitude des sujets délicats. Dans ses chroniques hebdomadaires à Tout un matin, elle aborde souvent de front des thèmes qui ne manquent pas de faire réagir l’auditoire : la violence conjugale, le féminisme, l’état de notre réseau d’éducation ou de santé, le sort des femmes, etc.
Contrairement à une chronique de quelques minutes à la radio, un roman donne le luxe des mots. Un plaisir qu’elle a savouré à sa pleine mesure. Autant j’ai eu peur de me mettre à écrire, autant c’est le projet dans lequel je me suis sentie le plus libre et qui m’appartenait. C’était mon carré de sable à moi, et je trouvais ça bien grisant.
Elle a aimé inventer son monde et aller au bout de ses idées sans limite de temps ou de budget.

Catherine Ethier lors de sa chronique au micro de « Tout un matin »
Photo : Radio-Canada / Marie-Eve Cloutier
La vulnérabilité de l’autofiction
Catherine Ethier est très emballée d’être l’une des membres du jury du Prix du récit de Radio-Canada. Elle promet de s’acquitter de sa tâche avec grand soin.
Je veux que les gens sachent que je vais les lire avec beaucoup de respect et de tendresse. Là, je sonne vraiment comme une maman…
, dit-elle avec une bienveillance non assumée. Elle est consciente de l’état de grande vulnérabilité dans lequel on se met lorsque l’on se lance dans l’écriture d’un récit personnel pour ensuite le jeter à la face du monde.
Le vertige est réel. Mais elle croit qu’il en vaut la peine.Une femme extraordinaire], j’ai raconté une histoire très près de moi. Je pense que c’est comme ça qu’on écrit de bonnes histoires, pas nécessairement en parlant de soi, mais en parlant de ce qui nous habite au moment où l’on écrit.”,”text”:”[Dans Une femme extraordinaire], j’ai raconté une histoire très près de moi. Je pense que c’est comme ça qu’on écrit de bonnes histoires, pas nécessairement en parlant de soi, mais en parlant de ce qui nous habite au moment où l’on écrit.”}}”>[Dans Une femme extraordinaire], j’ai raconté une histoire très près de moi. Je pense que c’est comme ça qu’on écrit de bonnes histoires, pas nécessairement en parlant de soi, mais en parlant de ce qui nous habite au moment où l’on écrit.
Alors, qu’est-ce qui l’habite présentement? Catherine Ethier se désole de voir beaucoup de solitude et de fatigue autour d’elle.
La solitude collective
Catherine Ethier se sent présentement entre deux chaises, dans ce contexte pandémique ambigu. La pause sociale a provoqué un grand silence qui fait du bien, mais qui est aussi parfois douloureux.
J’ai besoin de quelques jours de repos après un événement. Les batteries se vident très très vite. Je ne sais pas comment on faisait avant. J’imagine qu’il y a un juste milieu dans tout ça, mais c’est long avant que ça revienne. Et je n’ai pas nécessairement envie que ça revienne. C’est comme une nouvelle façon de vivre.

Catherine Ethier a remporté un Olivier en 2019.
Photo : Radio-Canada / AMELIE GRENIER
Dans les confidences spontanées reçues à la suite de la publication de son premier roman, elle constate à quel point beaucoup de personnes sont très seules, n’ont pas de ressources ou y ont difficilement accès. C’est ce qui l’inspire pour son prochain livre, sur lequel elle est déjà en train de plancher.
Je n’écris pas sur le mal de vivre, mais sur l’amitié et la solitude. L’étrange moment où l’on réalise qu’on est plus seule qu’on pensait. On doit se faire des amies alors qu’on n’est plus à l’école. Comment on fait quand on est adulte pour se faire des amies? Comment rompre cette solitude?
Son deuxième roman mettra en scène un personnage très loin d’elle pour éviter qu’on lui demande à répétition : C’est-tu toi?
Il n’y aura pas d’ambiguïté. Je ne veux plus vivre ça
, dit-elle en riant.
Véritable tremplin pour les écrivaines et écrivains canadiens, les Prix de la création Radio-Canada sont ouverts à toute personne qui écrit, de façon amateur ou professionnelle. Ils récompensent chaque année les meilleurs récits (histoires vécues), nouvelles et poèmes inédits soumis au concours.
Vous écrivez des récits? Envoyez-nous vos textes inédits d’ici le 28 février 2023!