L’écrivaine québécoise Denise Boucher s’est éteinte

La romancière, dramaturge, parolière et poétesse québécoise Denise Boucher, connue notamment pour sa pièce de théâtre Les fées ont soif, est décédée mardi à l’âge de 89 ans, a déclaré la maison d’édition L’Hexagone dans un communiqué. Elle a reçu l’aide médicale à mourir.

Ton aide médicale à mourir s’est passée aujourd’hui à 14 h, dans la musique, l’amour et le respect, a écrit sur sa page Facebook l’auteur-compositeur-interprète Dan Bigras, ami et collaborateur de l’écrivaine, avant de confirmer la triste nouvelle à Radio-Canada.

Tu m’as demandé de te chanter une chanson pendant que tu respirais ton dernier air. J’ai choisi notre chanson dont tu avais écrit le poème, Pour vous aimer, qui se terminait par cette phrase : “la longueur de la liberté”.

C’est une journée triste et belle à la fois. Tu pars à tes propres conditions, tes propres termes. C’est ça, la dignité.

En plus d’avoir écrit les paroles de Pour vous aimer, Denise Boucher a travaillé avec Gerry Boulet sur ses albums Rendez-vous doux (1988) et Jézabel (1994). Cette dernière oeuvre a été complétée par Dan Bigras après le décès de l’ex-chanteur d’Offenbach, en 1990.

[Denise Boucher] s’est engagée sa vie durant pour le féminisme, la souveraineté du Québec et la cause des artistes, a ajouté L’Hexagone dans le communiqué.

Les fées ont soif, entre succès et controverse

Denise Boucher, née le 12 décembre 1935 à Victoriaville, a d’abord été enseignante puis journaliste avant de se vouer plus sérieusement à l’écriture. Elle s’est d’abord fait connaître du grand public avec la pièce Les fées ont soif, mise en scène par Jean-Luc Bastien au Théâtre du Nouveau Monde (TNM) en 1978.

Si elle a connu un grand succès, la pièce a également causé la controverse en raison de sa dénonciation des archétypes féminins imposés par la société patriarcale et l’Église. Le brûlot féministe, qui mettait en scène la statue de la Vierge Marie, la maman et la putain, avait scandalisé certains catholiques québécois, qui ont réclamé à hauts cris le couperet de la censure d’État pour interdire la présentation de la pièce sulfureuse.

Le directeur du TNM à l’époque, Jean-Louis Roux, avait résisté aux manifestations devant le théâtre, même si le Conseil des arts menaçait de lui couper les vivres. Les tribunaux ont finalement eu raison des censeurs. La pièce, qui a fait grand bruit à l’époque, a été remontée 40 ans plus tard au Théâtre du Rideau Vert, en 2018, dans une mise en scène de Sophie Clément, qui était de la distribution originale.

Le beau grand bateau de Gerry Boulet

En plus de nombreux recueils de poésie et de quelques romans, Denise Boucher a écrit des paroles pour plusieurs artistes populaires comme Pauline Julien (Marie m’a dit, J’pensais jamais, J’ai une peine d’amour minable), Louise Forestier et Chloé Sainte-Marie (Bonjour tendresse).

Ses collaborations les plus marquantes demeurent probablement celles avec Gerry Boulet, pour qui la parolière a écrit plusieurs textes, dont celui de son grand classique Un beau grand bateau, qui a remporté le Félix de de la chanson de l’année en 1990. Sur le même album, Rendez-vous doux, elle a aussi signé les paroles d’Angela.

Elle aussi signé les textes de l’album-concept Jézabel, une tragédie-gospel dont l’histoire se déroule neuf siècles avant Jésus-Christ. Ce sera finalement Dan Bigras qui endisquera l’oeuvre en 1994, avec la voix de Gerry Boulet, déjà enregistrée, et l’aimable participation de Ginette Reno et d’Angèle Dubeau.

En plus de son implication dans les causes féministe et souverainiste, Denise Boucher a été très active dans le milieu littéraire. Elle a d’ailleurs été présidente de l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) de 1998 à 2000.

Denise Boucher a reçu en 2017 le Grand Prix du Festival international de la poésie de Trois-Rivières. Ce festival avait déjà décerné en 2015 à cette fille de Victo son prix Adagio, qui honore la carrière d’un écrivain de la Mauricie ou du Centre-du-Québec.

La poète avait par ailleurs fait son entrée en 2018 dans le Petit Larousse illustré : on soulignait que son théâtre revisite les archétypes féminins pour une critique du patriarcat et de tous les conformismes.

En 2019, elle a reçu le Prix Hommage Québecor pour l’ensemble de son œuvre.

Avec les informations de La Presse canadienne